L’Hydromel est connu pour être l’une des premières boissons fermentées bue par les hommes ! Une mythologie l’entoure, un imaginaire l’accompagne. Boisson divine à base de miel fermenté et d’eau, l’hydromel remonterait à 7000 avant JC en Chine. On en aurait trouvé des traces concrètes mais également des écrits l’évoquent en 350 avant JC : c’est l’époque d’Aristote ! En parallèle, dans le Nord, les Walkyries nous auraient légués l’expression « Lune de Miel » grâce à l’Hydromel !
’Le premier mariage est une coupe de miel ; le deuxième est une coupe de vin ; et le troisième une coupe de poison’ Proverbe Serbe
Deux éléments dans la création de l’Hydromel: le miel et l’eau.
La qualité du miel est très importante : la couleur et l’intensité du goût vont être déterminantes pour la boisson. On privilégie souvent les miels clairs afin d’avoir de l’Hydromel clair et du miel avec un goût pas trop prononcé comme le miel d’acacia, de colza ou de tournesol. Bien entendu, il est possible d’utiliser tous les types de miel mais plus le miel est sombre, plus la boisson le sera et idem pour le goût. Cela peut être très intéressant avec le miel de châtaigne, de romarin, de sapin pour les Vosges, de lavande, de fleur d’oranger, de litchi (à la Réunion), de Manuka (en Nouvelle Zélande)… Ca donne envie !
La quantité de miel à faire fermenter dépend du type d’Hydromel que l’on souhaite obtenir : sec (0 à 10g/L de sucres résiduels), demi-sec, moelleux ou liquoreux (40 à 60g/L de sucres résiduels).
Sachant que l’on a besoin de 17g/L de sucre pour faire un degré d’alcool et que 70% du miel est fermentescible, on a donc besoin d’environ 24,5g/L de miel pour un degré d’alcool. Petit calcul rapide : combien de quantité de miel pour faire 1L d’Hydromel? Réponse : 2,94Kg de miel pour 1L d’Hydromel sec à 12% par exemple.
L’autre élément essentiel : l’eau. Elle doit être pure et non chlorée, idéalement de l’eau de source. Comme dans toutes fermentations ou distillations nécessitant de l’eau, cet élément doit être irréprochable. Il faut donc faire très attention à sa composition car si elle est polluée, l’Hydromel le sera. En terme de quantité, la cuve doit être remplie à moitié d’eau, on ajoute ensuite le miel et on complète avec de l’eau en faisant attention à ce que la cuve ne soit pas remplie à ras bord puisque la fermentation va entrainer la création de mousse et de gaz.
Pour faciliter d’ailleurs cette fermentation, des levures exogènes (saccharomyces) sont rajoutées pour ne pas qu’il y ait d’accrocs, ainsi que des sels nourriciers pour les levures car le miel n’en contient pas contrairement aux raisins et aux pommes. A la fin de la fermentation qui est stoppée avec des sulfites, l’Hydromel passera un petit moment en barrique de chêne ou de châtaignier afin de gagner les arômes tant attendus, de rajouter de la couleur et aussi d’acquérir des tanins nécessaires pour la conservation. Les Hydromels clairs passeront peu ou pas de temps en barriques afin de ne pas altérer leurs goûts discrets.
Pour déguster cette boisson, il faut la boire fraiche (8 à 12°), en apéritif ou en fin de repas avec les fromages (chèvre) et les desserts. Il est aussi commun aujourd’hui de mélanger l’Hydromel pour en faire des cocktails et kirs.
Maintenant que vous en savez plus sur cette boisson douce à base de miel, il faut aussi être conscient de la mythologie qui l’entoure. Je vous l’ai déjà rappelé : l’Hydromel est sûrement l’une des plus vieilles boissons alcoolisées connues. Le miel a une réelle place dans les sociétés égyptiennes, grecques, celtes et vikings…
En Egypte, le miel blanc est réservé aux hautes castes de la société alors que le miel jaune est à disposition du commun des mortels. Le miel est utilisé en offrande aux Dieux, on oint le corps des morts également avec cet or liquide. On utilisait aussi cette douceur comme médicament pour des maux d’estomac ou pour soigner les blessures.
Les Hindous font état de l’Hydromel dans les livres vedas datant d’il y a 4000 ans. Les Dieux Krishna et Indra sont nés de ce nectar de la ruche. L’Hydromel serait alors une source du paradis de Vishnu.
La Bible fait largement état du miel et parle de la Palestine comme de « la terre du miel et du lait ».
Le miel a une place importante comme offrande dans de nombreuses religions. En Egypte, en Inde donc mais aussi en Grèce où des gâteaux au miel sont offerts pour honorer les Dieux, les morts et les héros.
Dans la mythologie grecque, la déesse de la Jeunesse, Héra, offre du miel aux autres Dieux pour qu’ils ne vieillissent pas. C’est pour cela que le mort emportait des gâteaux au miel pour les offrir à Pluton, dieu des Enfers pour qu’il soit en bonne santé. Les grands auteurs grecs font état de l’utilisation du miel lors des repas et aussi mélangé au vin ou encore comme onguent. L’Hydromel est la boisson des Dieux qui les rend immortels et des héros. Selon la légende, cette boisson serait une rosée tombée du ciel dans laquelle les abeilles ont bu. Elles offrent alors depuis aux hommes une boisson considérée comme l’Ambroisie de l’Olympe. L’Hydromel serait également une boisson magique aux vertus sacrées : la Pythie de Delphes consommait de l’Hydromel avec des plantes toxiques pour pouvoir rendre ses oracles au nom d’Apollon.
Les Romains, de leur côté, voue un culte à l’abeille et au miel. Les Romains embaumaient leurs morts avec du miel également et bien sûr les Dieux avaient droit à des offrandes à base du suc des abeilles. Toujours présent dans la médecine, le miel est utilisé abondamment. Pourtant c’est le vin qui est consommé en quantité : Bacchus est une divinité indétrônable. L’Empire romain s’étendant vers l’Europe du Sud, le vin va supplanter l’Hydromel petit à petit. Les celtes consomment de l’Hydromel ainsi que de la cervoise et vont se mettre au vin avec la colonisation des Romains. Selon les celtes, l’Hydromel coule comme une rivière au paradis.
A contrario, l’Europe du Nord avec son climat froid n’est pas idéale pour la vigne : l’Hydromel reste donc une boisson de choix synonyme de connaissance et d’immortalité. En Scandinavie et dans les pays germaniques, l’Hydromel est la boisson des guerriers : ceux qui sont tombés au combat partent dans l’au-delà au Palais Walhalla où règne le Dieu de la Guerre et du Savoir, Wotan. Les guerriers sont accueillis par les Walkyries. Ils s’entraînent durant la journée en se battant contre les démons et le soir ils s’enivrent d’Hydromel en festoyant.
Pourtant petit à petit, le miel qui avait cette place centrale dans les sociétés va disparaître. On l’utilise aujourd’hui surtout pour son pouvoir sucrant ou pour redonner de l’appétence aux personnes âgées. Il y a toujours, comme en Bretagne avec le Chouchen, des irréductibles buveurs d’Hydromel !
C’est la dégustation d’un Chouchen que je vous propose aujourd’hui ! Focus Honey Honey !
– Chouchen, Hydromel de Bretagne, Chamillard de Gilles Barbé
La couleur est superbe sur l’orange sombre, presque ambre. Limpide et brillant dans le verre, l’odeur du chouchen se dégage fortement. C’est une odeur fermentaire, un mélange de bière et de cidre avec en fond de nez le miel classique jaune et puissant. La bouche est acidulée et très sucrée. L’ensemble est puissant avec toujours ce côté fermentaire. Le miel, la pomme très mûre, le pollen de fleur jaune. La fraicheur de la bouteille au frigo s’estompe et laisse la place à une lourdeur alcolleuse. C’est plus puissant que lourd en définitive mais ce n’est pas une boisson raffinée. La finale est longue sur la rose fanée, le pollen et le miel jaune.
J’ai bu le chouchen sans rien pour vraiment saisir sa sensation. Il est évident qu’il serait délicieux avec du melon ou comme une gourmande me l’a soufflé : une crêpe miel citron !
Et vous, quand allez-vous le goûter ? Dépêchez-vous car les industrieuses abeilles qui nous offrent l’essence même de ce doux nectar sont de plus en plus menacées…